Listeria monocytogenes : Classification, Manifestations cliniques, Identification et Résistance



◉ Historique

Listeria monocytogenes, l'espèce-type du genre Listeria, a été décrite en 1926 par Murray. La bactérie a été initialement isolée lors d'une épizootie touchant des lapins et des cobayes, caractérisée par une forte augmentation des monocytes circulants et des lésions de nécrose hépatique.

Par la suite, cette bactérie a été isolée chez différentes espèces animales, tant domestiques que sauvages. Chez l'homme, elle a été initialement associée à des cas de méningite chez les adultes, avant que Burn ne démontre en 1933 son rôle dans les infections néonatales.

Les travaux ultérieurs de Seeliger ont souligné l'importance de L. monocytogenes dans la pathologie humaine.

◉ Habitat

L. monocytogenes est une bactérie saprophyte et ubiquitaire, largement répandue dans l'environnement, y compris dans le sol, les eaux, les végétaux et les matières fécales des individus sains, qu'ils soient humains ou animaux.

Cette espèce est couramment retrouvée dans une variété d'aliments d'origine animale tels que le lait, la viande, les charcuteries, les poissons, les fromages, ainsi que dans des aliments d'origine végétale comme les crudités et les choux.

Helicobacter Pylori

Dotée d'une grande résistance dans le milieu extérieur, L. monocytogenes peut survivre plusieurs années dans des conditions de froid. Sa capacité à se multiplier à des températures aussi basses que +4 °C lui permet d'atteindre des concentrations élevées dans les aliments conservés au réfrigérateur.

La contamination des aliments peut se produire à différents stades, que ce soit lors de la production ou chez le consommateur dans le réfrigérateur.

◉ Épidémiologie

La listériose est une saprozoonose, dont le réservoir tellurique est généralement responsable de cas sporadiques.

La contamination humaine survient le plus souvent de manière indirecte, par voie digestive. Cependant, des cas de contamination directe au contact d'animaux infectés, notamment chez les éleveurs et les vétérinaires, sont également rapportés, bien que rarement.

Des infections nosocomiales ont été documentées dans des maternités, sous forme de petites épidémies, souvent consécutives à des pratiques d'hygiène défectueuses telles que l'utilisation non conforme de thermomètres ou de couveuses.

En Algérie, depuis 1967, une dizaine de cas de listériose humaine ont été recensés, tandis qu'en Tunisie, cinq cas ont été enregistrés de 1989 à 1997. On peut donc considérer que la listériose est rare au Maghreb, où elle se manifeste sous forme sporadique.

Dans les pays industrialisés, de nombreuses épidémies ont été signalées, notamment en France, aux États-Unis (notamment à Los Angeles en 1985, où 142 cas ont été recensés), au Canada, en Grande-Bretagne et en Suisse en 1987 (avec 122 cas).

◉ Pouvoir Pathogène

La listériose survient préférentiellement chez les individus dont le système immunitaire est perturbé, soit de manière naturelle (femmes enceintes, personnes âgées) soit suite à une maladie ou à un traitement immunosuppresseur. Bien que relativement rare, la maladie peut avoir des conséquences graves.

Les infections à Listeria chez l'homme se divisent en deux grands groupes :

◉ 1. Listériose chez la femme enceinte

L'infection survient généralement au cours des deux premiers trimestres de grossesse. Elle peut être bénigne, se manifestant par de la fièvre isolée, un syndrome pseudo-grippal, ou passer inaperçue. Cependant, lorsqu'elle se produit tôt dans la grossesse, elle peut entraîner un avortement. Une infection plus tardive peut provoquer un accouchement prématuré.

◉ 2. Infection chez le nouveau-né

Chez le nouveau-né, deux voies principales de contamination sont distinguées : la voie hématogène placentaire et la voie ascendante transmembranaire. On distingue deux formes :

◉ 3. Listériose chez l'adulte

Ces infections surviennent principalement chez des personnes à risque telles que les personnes âgées, les immunodéprimés ou les patients atteints de cancer, se manifestant sous forme de méningite, de méningo-encéphalite ou de septicémie.

◉ Physiopathologie et Facteurs de Virulence

La porte d'entrée principale de Listeria monocytogenes est digestive, via la consommation d'aliments contaminés.

Une fois ingérées, les bactéries pénètrent dans les cellules M des plaques de Peyer de l'intestin. De là, elles sont phagocytées et se dirigent vers les ganglions lymphatiques régionaux, puis entrent dans la circulation sanguine.

Dans les organes-cibles tels que le foie et la rate, les bactéries se multiplient. Chez les individus immunocompétents, l'infection est généralement contrôlée par le système immunitaire, les bactéries étant phagocytées par les cellules de Kuppfer, entraînant souvent une infection inapparente.

Cependant, en cas d'inoculum massif ou chez des individus fragilisés, l'infection n'est pas contrôlée dans l'intestin, la rate et le foie, et les bactéries sont libérées dans la circulation sanguine, ce qui expose le placenta et le système nerveux central.

La virulence de Listeria monocytogenes est étroitement liée à sa capacité de multiplication à l'intérieur des macrophages, en tant que bactérie intracellulaire facultative.

Les principaux facteurs de virulence comprennent :

◉ Diagnostic Bactériologique

◉ A. Produits Pathologiques

Chez le nouveau-né : liquide gastrique, méconium, liquide céphalorachidien (LCR), sang et autres prélèvements périphériques.

Chez la mère : placenta, lochies, sang, liquide amniotique.

Dans les autres cas : sang, LCR, lésions cutanées, aliments et selles pour détecter les porteurs de la bactérie.

◉ A. Examen Direct

Les colonies de L. monocytogenes apparaissent sous forme de petits bacilles à gram positif, disposés en paires ou en courtes chaînettes. Après culture en milieu liquide, les bacilles peuvent être plus longs et disposés en palissade.

Dans le LCR où les bactéries sont peu abondantes, L. monocytogenes peut être intra ou extracellulaire, avec un risque de confusion possible avec Corynebacterium et les streptocoques.

Les bactéries sont mobiles à 22 °C et immobiles à 37 °C, présentant un mouvement en rotation ou en ombrelle.

◉ C. Culture

La croissance de L. monocytogenes est obtenue en aérobiose. Pour les prélèvements monomicrobiens, la culture est réalisée sur gélose nutritive (GN) ou gélose au sang (5 % de sang de mouton ou de cheval). Après 18 à 36 heures d'incubation à 35 °C, les colonies apparaissent arrondies, lisses et β-hémolytiques.

L'identification du genre Listeria repose sur plusieurs caractéristiques:

Pour les prélèvements polymicrobiens, un enrichissement sélectif est nécessaire. L'enrichissement à +4 °C dans un bouillon BGT pendant plusieurs jours avec repiquages hebdomadaires (technique de Gray) est recommandé. La culture est ensuite réalisée sur des milieux sélectifs comme la gélose au sang + acide nalidixique ou colistine, Mc Bride, Tryptose agar, PALCAM, incubés à 30 °C pendant 36 à 48 heures. Les colonies sont ensuite repérées à la loupe binoculaire et repiquées sur gélose au sang pour identification

◉ D. Sérotypie

Les antigènes somatiques (15 Ag 0 : I à XV) et flagellaires (5 Ag H : A à E) permettent de définir 16 sérovars. Environ 95 % des souches isolées d'infections humaines appartiennent au sérovar 1/2a, 1/2b ou 4b. En pratique, le typage est réalisé par agglutination sur lame à l'aide d'antisérums spécifiques. Il convient de noter qu'il existe une communauté antigénique entre Listeria monocytogenes et d'autres bactéries telles que Staphylococcus aureus, Enterococcus faecalis et Bacillus.

◉ E. Lysotypie

La lysotypie, réalisée grâce à des lots de phages (219), permet de distinguer des groupes de souches au sein d'un même sérovar. Cette méthode est utile pour étudier la diversité génétique et la variabilité des souches de Listeria monocytogenes.

◉ Prévention

Pour prévenir la listériose chez les femmes enceintes et les personnes immunodéprimées, il est recommandé de prendre les mesures suivantes :

Ces mesures simples peuvent contribuer à réduire le risque de contracter la listériose en limitant l'exposition à Listeria monocytogenes dans l'alimentation et en maintenant des pratiques d'hygiène appropriées en cuisine.

◉ Traitement

Le traitement de choix pour la listériose reste l'association d'ampicilline et de gentamicine. Dans les cas de formes septicémiques graves, l'ajout de vancomycine peut être nécessaire pour une couverture efficace.


Références

  1. Dr .BENCHERIF.L.B- Laboratoire Central- CHU DE SETIF
  2. Emilie Dumas - Listeria monocytogenes:Caractérisationfonctionnelle d’un mutantferritine.Etudedelabiodiversitéparune approcheprotéomique