La brucellose, également appelée fièvre de Malte, fièvre sudéro-algique ou fièvre ondulante est
une
maladie infectieuse,
à déclaration obligatoire, commune à certains animaux et à l’homme, due à des coccobacilles du
genre
Brucella.
☰ Ordre : Rhizobiales
☰ Classe : Alphaprotéobactéries
☰ Famille : Brucellacées (nommée d'après le genre Brucella)
Brucella est considérée comme un organisme bioterroriste en raison de ses faibles doses
infectieuses
(10 à 100 bactéries), de sa capacité de persistance dans l'environnement, de sa transmission
rapide
par différentes voies, y compris les aérosols, et enfin en raison de son traitement difficile
par
les antibiotiques.
Ⅰ.
Évolution/taxonomie
- Depuis la création du genre et la description de B.
melitensis et B. abortus par Meyer et Shaw en 1920, la
classification
des espèces de Brucella est restée problématique et est encore aujourd'hui un
sujet
de discussion et de débat
Avec le développement de techniques à base d'acide nucléique, en particulier la technologie
d'hybridation ADN – ADN pour mesurer les relations basées sur les acides nucléiques, il
est
devenu
évident que toutes les espèces de Brucella
forment un groupe serré d'espèces génétiquement hautement apparentées avec des similitudes
génomiques> 87%.
Cependant, après la découverte de la nouvelle espèce de Brucella, le vieux
débat
a repris. Le positionnement des espèces de Brucella atypiques récemment
détectées
(en particulier B. microti et B. inopinata ) était
problématique
en raison de leur
nette distinction avec les espèces classiques
(les six premières espèces identifiées Brucella melitensis, Brucella abortus, Brucella
suis,
B. canis, B. ovis et B. neotomae )
Le terme « atypique » désigne ici soit un phénotype (profil biochimique, rapidité
de
croissance)
clairement différent par rapport aux espèces classiques (B. microti et B. inopinata) et / ou des
espèces avec un degré de diversité génétique plus élevé (B. inopinata et en particulier
B.
vulpis).
☰ Le genre Brucella est le genre type de la famille des Brucellaceae,
composé actuellement de 12 espèces avec des noms validement publiés (B. melitensis
regroupe 3
biovars (1-3), B.
abortus regroupe 7 biovars (1-6, 9) et B. suis en regroupe 5 (1-5)).
Ⅱ.
Épidémiologie/Transmission
☰ Les moutons, les chèvres, les bovins, les chameaux, les porcs, les chiens et
autres
mammifères sont les principaux réservoirs de l'infection humaine. Le placenta, les liquides
fœtaux
et les pertes vaginales expulsés par les animaux infectés
après un avortement provoqué par Brucella sont d'importantes sources d'infection pour l'homme et
les
autres animaux
☛ Par contact direct avec les animaux malades : Eleveurs, vétérinaires et ouvriers
d’abattoirs. (Brucellose professionnelle)
☛ Apres ingestion : d’aliments contaminés (lait et produits dérivés non
pasteurisés,
plus rarement crudités contaminées par du fumier ou exceptionnellement viande insuffisamment
cuite).
Les mains contaminées par un produit souillé peuvent entraîner exceptionnellement une
contamination
par voie digestive.
☛ Apres inhalation de poussière de litière, d’aérosol contaminé dans un
laboratoire,
un abattoir ou encore dans une étable vide à cause de la transhumance
!! En 1983, Stantic Pavlinic a décrit le premier cas rare de transmission
interhumaine lorsqu'un travailleur de laboratoire a probablement transmis la maladie à sa femme.
De
rares cas d'acquisition par transplantation d'organes, contact sexuel, allaitement, voie
transplacentaire, dérivés cosmétiques contaminés et transfusion d'échange ont été décrits
☰ L’épidémiologie de la brucellose humaine est étroitement liée à
l’infection
animal, L’OMS estime
l’incidence mondiale de la maladie à 500000 cas par an. La prévalence mondiale actuelle
de
toutes les formes
de brucellose est en pratique limitée à l’Amérique latine, au Moyen-Orient,
aux
Région des Balkans, Mongolie, Russie, Chine et certains pays méditerranéens.
- Une étude réaliser sur les 15 principaux pays en nombre de cas de brucellose enregistrés en
2012, l’Algérie vient en 5eme position avec 5298 CAS après Mexico (127 756),
China
(39 515), Iran (8610), Turkey (6759)
- Une autre étude réaliser en ALGRERIE en 2019 (sur 48 wilayas) qui évalue
l’évolution de cas de brucellose entre 2010 -2015(tableau), le nombre des cas était très élevé
au
niveau de Djelfa 14399 CAS, m’sila 10453 CAS, Tébessa 7659, Laghouat 7216 CAS, Biskra 5498 CAS
Ⅲ.
Caractères bactériologiques
1- Morphologie: Petit coccobacille à gram négatif, aérobie
strict,
immobile, habituellement isolé rarement en paire ou en chaînette(en milieu liquide) non capsulé
et
non sporulé.
Il existe des souches Smooth (lisses) et des souches Rough (rugueuses). En général,
les formes pléomorphes sont rares, sauf dans les anciennes cultures poussant dans des conditions
défavorables
2- Caractères culturaux: La plupart des Brucella classiques
se comportent comme des organismes exigeants à croissance lente lors de l'isolement primaire
du matériel clinique. Les colonies sont à peine visibles avant 48 h. (Sous 5 % de CO2, PH 6,8 et
T°37 °C.)
1. Pour les Prélèvement mono-microbien
- Gélose TSAY :Trypticase Soy Agar (+/- extrait de levure)
- GSC (gélose au sang cuit)
2. Prélèvement polymicrobien :
- Milieu de Farrell : Gélose à extrait de foie et de levure additionnée
(cycloheximide , polymixine B ,vancomycine, acide nalidixique ,nystatine)
- Brucella sur TSA : Petites colonies de 0,5 mm, à
bords
arrondis, translucides, bleutées, plus la culture prend de l’age plus les Colonies deviennent
couleur miel.
- Brucella sur Gélose au sang cuit : Colonies très
fines
0,5 mm de diamètre. Elles sont grisâtres, blanchâtre, légèrement bombées (non hémolytiques sur
GSF
de cheval) puis elles deviennent orange-jaune.
3- Caractères biochimiques :
- Aérobie stricte (B.abortus et B.ovis exigeant en CO2)
- Catalase +.
- Oxydase + (sauf B.neotomae et B.ovis)
- uréase positif et rapide ( sauf Pour B.ovis),
- Nitrate réductase + (sauf B.ovis)
- Citrate -.
- RM -, VP -.
- B.abortus produit de l’H2S
4- Détermination des biovares :
☰ Du fait d’une faible réactivité biochimique, l’identification de ces bactéries par les
méthodes phénotypiques usuelles est difficile
☰ L'identification classique de biovar se fait par l'étude de différents caractères
(tableau
suivant) comprenant :
- Des caractères culturaux (exigence en CO2, inhibition de la croissance par des colorants
comme
la thionine et la fuchsine) ;
- Des caractères métaboliques (production H2S, rapidité de l'hydrolyse de l'urée, sources de
carbone);
- Des caractères antigéniques ;
- La sensibilité à des bactériophages.
Ⅳ.
Rappel clinique
La brucellose aiguë correspond à la primo-infection. Elle est marquée par une
septicémie, provoquant de la fièvre, classiquement ondulante. On retrouve dans les signes
cliniques des douleurs articulaires, des sueurs profuses, une
micro-poly-adénopathie. Ce tableau
clinique est peu spécifique, si bien que le diagnostic de la maladie n'est pas toujours fait.
La brucellose subaiguë ou brucellose focalisée se produit à distance de la
primo-infection ou lui fait immédiatement suite. Elle est marquée par des lésions
suppurées,
le plus
souvent des abcès osseux (spondylodiscite), quelquefois une hépa-tosplénite, des atteintes des
gonades (orchites) ou neuroméningées (neurobrucellose). La bactérie est présente dans le sang et
dans les lésions.
La brucellose chronique a comme signe majeur l'asthénie (physique,
psychique et
sexuelle), accompagnée irrégulièrement de fébricule. Il est alors impossible de mettre en
évidence
l'agent pathogène, mais il existe une importante réaction d'hypersensibilité aux antigènes
brucelliens. Il s'agirait donc d'une forme inflammatoire, en réponse à la persistance de
Brucella
dans certains sites de l'organisme
Ⅴ.
Diagnostic de la Brucellose
La brucellose est la maladie professionnelle la plus fréquente
chez les personnels de laboratoire, du fait de l'extrême contagiosité de la bactérie(Sous hotte,
port de gants, masque et lunettes.).
Definition de CAS (Recommandation algérienne 2018):
- Cas probable : Toute personne répondant aux critères cliniques et
présentant un lien épidémiologique.
- Cas confirmé : toute personne répondant aux critères bcliniques et aux
critères du laboratoire.
Critères cliniques :
-
Toute personne présentant de la fièvre, ET au moins un des signes suivants :
Sueurs (abondantes, malodorantes surtout nocturnes), frissons, syndrome
algique
(arthralgie, céphalée), asthénie
Critères épidémiologiques : Au moins un des trois liens épidémiologiques suivants
- Exposition à des aliments contaminés : produits laitiers non pasteurisés
- Exposition à des produits animaliers contaminés : secrétions, organes, placenta, tissus dans
un
cadre professionnel ou autre
- Exposition à des produits de culture bactérienne ou inhalation de poussières/aérosols
contaminés
dans un contexte professionnel ou autre
Critères laboratoire : Au moins un des 2 critères suivants
- Isolement de Brucella spp à partir d'un échantillon clinique
- Detection de la Formation d'anticorps spécifiques de Brucella (sérologie de
wright,Rose Bengale , IFI)
Prélèvements :
☰ Divers: Hémocultures, LCR, ganglions lymphatiques, M.O, liquide articulaire et pus de
foyer
suppuré....
NB : Fiche de renseignement complète indispensable avec demande précise de recherche de
Brucelles. Certaines notions épidémiologiques permettent d’orienter la recherche : Milieu rural
ou
non, région, profession, notion d’ABRT du bétail
Examen microscopique :
☰ Il est de peu d'utilité, du fait du matériel clinique (sang le plus souvent), de la très
petite taille et de la faible coloration de la bactérie par la coloration de Gram.
Culture de Brucella :
Hémoculture
C'est la méthode la plus sûre , réalisée de préférence en période fébrile. Les
hémocultures
sont positives dans 70 à 80% des cas au cours de la phase septicémique et 20 à 45%
des cas dans les formes focalisées.
L'hémoculture doit être pratiquée avant toute antibiothérapie et répétée. Bien étiqueter les
flacons
avec (nom, prénom, âge du malade, température, l'heure de prélèvement.).
Le temps d'incubation doit être prolongé (14 à 21 jours) , et une subculture finale en
aveugle
peut améliorer les résultats.
Les automates d'hémoculture (Bactec, Vital, BacTAlert) détectent les échantillons positifs en
moins
de 5 jours dans 95 % des cas, mais là encore, une incubation prolongée est recommandée si une
brucellose est suspectée (21 jours).
Autres cultures
Brucella peut coloniser tous les organes et toutes les humeurs. C'est dire que tout prélèvement
obtenu par ponction
ou à l'occasion d'un geste chirurgical chez un sujet brucellisé peut et doit être confié au
biologiste
☰ Toute culture positive doit faire l’objet d’un:
- Examen microscopique (coccobacilles à gram -)
- Identification du genre
- Identification d’espèce.
- Identification des biovares
- Antibiogramme (sous hotte car très dangereux) : Réaliser sur MH + 5 % de sang de cheval.
Sérodiagnostic de Wright ⤓⤓:
Le test d'agglutination en tube ou sérodiagnostic de Wright demeure la méthode la plus utilisée
et
la réaction de référence pour OMS, C'est l'examen le plus utilisé dans la forme aigue et
subaigüe
(La réaction se positive dès le 12e ou 15e jour), il s’agit d’une technique d'agglutination
quantitative qui met en évidence IgG et IgM (surtout les IgM.)
Le test consiste à titrer les anticorps en effectuant une série de dilutions 1/20, 1/40,
etc.
Ne sont considérés comme positifs que les taux supérieurs ou égaux au 1/80 (FAO et OMS, CNR
BRUCELLA
- CHU DE NÎMES),
Le CDC (Center for diseases control) préconise un titre limite de 1/160 avec une incubation de
48
heures à 37 °C.
Un titre plus faible (1/40, et même 1/20) doit éveiller la suspicion et justifie un
sérodiagnostic
quelques jours plus tard
Epreuve à l'antigène tamponné : ROSE BENGALE ⤓⤓:
Est une technique de dépistage d'abord utilisée par les vétérinaires. Elle s'effectue de manière
simple en mélangeant sur un morceau de bristol une goutte de sérum à une suspension de Brucella
tué
et coloré. La réaction est exprimée par des croix (d’une à quatre). Un test positif détecte au
minimum 25 UI/ml. Elle met en évidence les anticorps IgG.
La réponse est positive tardivement (2 à 3 semaines) et la sensibilité de la technique est très
élevée (> 95 %). Agglutination même minime → le sérum est positif
Immunofluorescence indirecte (I.F.I) :
L'immunofluorescence indirecte utilisée est une suspension inactivée de Brucella. Cette méthode
permet un titrage des IG totales ou des IgM. Sa sensibilité est excellente et elle est positive
dans
les formes chroniques.
ELISA :
Leur détection permet de suspecter la maladie. C’est un test particulièrement intéressant en cas
de
brucellose chronique, compliquée ou localisée quand les autres tests sont négatifs, dont
l'interprétation est équivalente à celle de l'immunofluorescence indirecte. Son automatisation
facile permet de l'utiliser dans les enquêtes épidémiologiques. Cependant, la grande diversité
d'antigènes utilisés limite sa standardisation et sa commercialisation
Les techniques d’amplification génique :
La PCR est une technique sensible et spécifique, particulièrement utile dans le cas où
l’administration d’une antibiothérapie empirique empêche l’isolement des Brucella. Elle est
réalisée
à partir du sang ou du sérum à la phase aiguë bactériémique et à partir de biopsies tissulaires
ou
de suppurations au cours des formes focalisées de brucellose.
Les gènes cibles utilisés dans le cadre du diagnostic direct sont principalement le gène bcsp31
codant pour une protéine de membrane externe de 31 kDa, et la séquence d’insertion IS711 dont
plusieurs copies sont présentes dans le génome des Brucella.
La plupart des tests PCR utilisés sont spécifiques de genre, et ne permettent pas de déterminer
l’espèce en cause.
Ⅵ.
Traitement de Brucellose
L'objectif du traitement de la brucellose est d'éviter Ia survenue de formes focalisées et de
rechutes précoces ou tardives Le traitement est fonction du stade et des formes cliniques de la
maladie, il comprend un traitement curatif et un traitement adjuvant selon les cas
1. Traitement curatif (schéma ALGERIE 2018 tableau suivant) :
- Cyclines (Doxycycline), Aminosides (Gentamicine), Rifampicine, Autres (Cotrimoxazole,
Fluoroquinolones « ciprofloxacine »)
2. Traitements adjuvants :
Ce dernier peut faire appel à : des anti- inflammatoires ; repos au lit ; traitement des
complications (immobilisation, ponction d'abcès, chirurgie, neurochirurgie, chirurgie
cardiovasculaire).
Traitement de Brucellose aigue :associer 2 Antibiotiques
1éreintention :
1. Doxycycline per os :200mg/j(en une prise au milieu du repas) pendant6 semaines.
2. Gentamicine en IM : B0 mg 2 fois/) pdt 7 à 14 jours
2émeintention :
1- Doxycycline per os :200 mg/j (en une prise au milieu du repas) pdt 6 semaines.
2. Rifampicine per os :900 mg/j [en une prise à distance des repas) pdt 6 semaines.
3émeintention :
1. Doxycycline per os :200mg/j(en une prise au milieu du repasJ pdt 2 mois.
2. cotrimoxazole per os TMP 320 mg/j, sMx 1600 mg/j (en deux prises) pdt 2 mois
Traitement de Endocardite Brucellienne :associer 3 Antibiotiques
1. Doxycycline per os :200 mg/j [en une prise au milieu du repas) pdt 3 mois
2. Rifampicine per os : 15 mg/Kg/j (en une prise à distance des repas) pdt 3 mois
3. Gentamicine IM : 5 mg/Kg/j pdt 14 à 21 jours
ou
1. Doxycycline per os :200 mg/j [en une prise au milieu du repas) pdt 3 mois
2. Rifampicine per os : 15 mg/Kg/j Gn une prise à distance des repas) pdt 3 mois
3. Cotrimoxazole per os (TMP 320 mg+ SMX 1600 mg/j en deux prises) pdt 3 mois.
Traitement de Brucellose OSTEO-ARTICULAIRE :
1. Doxycycline per os :200 mg/j [en une prise au milieu du repas) pdt 3 mois
2. Rifampicine per os : 900 à 1200 mg /j en une prise à distance des repas pdt au moins 3 mois
3. Gentamicine IM : 5 mg/Kg/j pdt 14 à 21 jours
ou
1. Rifampicine per os : 900 à 1200 mg/j en une prise à distance des repas pdt au moins 3
mois
2. Cotrimoxazole per os (TMP 320 mg+ SMX 1600 mg/j en deux prises) pdt 3 mois.
NB :La durée du traitement peut être plus longue jusqu'à 6 mois en fonction de l'importance
des
atteintes osseuses,
Traitement de Brucellose NEUROMENINGEE :
1. Cotrimoxazole per os (TMP 320 mg+ SMX 1600 mg/j en deux prises) pdt au moins 3 mois.
2. Rifampicine per os : 900 à 1200 mg /j en une prise à distance des repas pdt au moins 3 mois
3. Gentamicine IM : 5 mg/Kg/j pdt 14 à 21 jours